Rare sont les dossiers que n’accompagnait pas une vidéo. Le making of d’une affiche, d’un packaging, l’explication d’un rebranding, d’un événement, les coulisses d’un tournage… La vidéo est désormais au centre de toutes les stratégies d’activation.
A quelques exceptions près, ces vidéos ont plutôt desservi ceux qui les ont produits car le jury décrochait toujours pour a même raison : trop long ! Et pour le coup, j’ai retrouvé là ce que les statistiques des WatchTime de Youtube nous disent depuis longtemps : après 20 secondes, les audiences s’effondrent. Il appartiendra surement aux organisateurs des Palmes de limiter la durée des vidéos présentées. Et si cela n’est pas fait d’autorité, les agences et annonceurs seraient bien inspirés de se restreindre en faisant plus court – et plus impactant. A mon sens 45s max.
Où est le risque ? Où est la différence ?
Quelle est l’idée ? Aussi étonnant que cela puisse paraitre, cette question est beaucoup revenue dans les discussions. Normalement, toute campagne part d’une idée. En réalité, ce n’est pas seulement la nécessaire clarté que l’on cherche à travers cette interrogation, c’est aussi l’existence saillante d’un angle, d’un risque. Toutes les opérations de communication qui ont été soumises au jury et pour lesquelles l’idée semblait claire et distinctive ont été récompensées. Et beaucoup de choses réjouissantes, que l’on n’aurait pas classées parmi de potentiels favoris ont tiré leur épingle du jeu. Il y a aussi eu des déceptions, et pas des moindres – le secret des délibérations m’empêchent d’en dire plus…
Forcément, vous me direz « et la musique dans tout cela ? ».
J’ai depuis toujours une position, sans doute discutable, sur le sujet : j’ai tendance à être plutôt indulgent en matière de musique et d’identité sonore. Je me dis toujours que si une entreprise choisit une musique qui ne marche pas, qui ne correspond pas à la marque ou à la stratégie d’une opération de communication, cette musique n’a pour autant pas été choisie par hasard ; Il y a toujours une raison même quand on se trompe. Le jury n’a pas eu autant de scrupule que moi. J’ai beaucoup ri lorsque j’ai entendu l’un des jurés lancer « Michael, je ne sais pas à quel point vous souffrez, mais moi j’ai les oreilles qui saignent ». Oui, de toute évidence, la musique est un défi très compliqué pour beaucoup de marques. C’est un défi qualitatif et quantitatif, c’est un défi de marque et c’est un défi quasi ergonomique.
La multiplication des supports et notamment des vidéos créent beaucoup de besoins et pour l’essentiel les agences se tournent vers des musiques de stock. Là n’est pas le problème en réalité car il y a de plus en plus de qualité dans les grandes librairies musicales comme Premium Beat ou Artlist. Le problème, c’est qu’il faut savoir monter une musique de stocks, essayer de la synchroniser avec intelligence et créativité. C’est un défi qui semble impossible ou inatteignable pour la majorité des contenus que nous avons vus. Et c’est vrai : sur certains films, une boucle qui tournent 10 fois d’affilé peut vous donner l’envie sauvage de jeter votre ordinateur par la fenêtre en priant pour qu’il retombe sur la tête du producteur.
Une nécessaire clarification pour plus d’ambition
Côté identité sonore, une bonne surprise : les marques et les agences y pensent de plus en plus. Le sujet n’était pas absent et on a pu écouter 4 ou 5 identités sonores parmi les dossiers présentés. Autre bonne nouvelle : les marques ont compris l’intérêt de l’outil, sa nécessité aussi. Moins positif, il y a clairement un malentendu. Les identités sonores que j’ai entendues travaillaient un peu la mémorisation, mais rien de plus. Aucune ne réservait de surprise. Aucune n’avait de personnalité marquée.
Sans personnalité marquée, rien n’est marquant et le son devient une illustration au lieu d’être une incarnation.
Le malentendu finira par créer de la déception. Une grande marque Pharma comprend la nécessité d’associer une identité sonore à sa nouvelle identité visuelle, mais ce qui en sort est complétement attendu, entendu cent fois, tellement convenu que le son finit par abimer le visuel quand il devrait le sublimer. A mon sens, mieux vaut rien plutot que ça. Une grande marque de mobilier fait créer une musique guitare manouche pour conter son histoire, c’est bien produit, il y a une vraie fraicheur mais la signature musicale qui en découle est une aberration. Elle se fond tellement dans l’univers qu’elle en disparait et laisse toute empreinte noyée. Et puis, les mélomanes y verront surement une similarité flagrante et troublante avec la mélodie de la plus célèbre chanson de Jacques Brel. A la place de l’annonceur, je ne prendrai pas le risque juridique de trop la déployer…
Dois-je continuer ?
Le malentendu est-il en réalité un manque d’ambition. Je ne crois pas. Comme me l’a dit l’un des patrons d’une agence à l’issue de la remise des prix, « on adorerait travailler davantage le sujet, mais on ne sait pas toujours ce que c’est qu’une identité sonore réussie ».
Alors, je reprendrai mon bâton de pèlerin, je poursuivrai l’évangélisation d’avec d’autant plus de force et de plaisir que l’intérêt n’a jamais été aussi grand et la volonté de faire bien aussi palpable.
Merci à Marie-Chantal di Martino-Dhoste et Laurence Gnassia de m’avoir invité à prendre part à cette aventure. Longue vie aux Palmes de la Communication et à très vite.